Quand une machine à sous devient plus bruyante et clignote avec frénésie, c'est souvent le signe qu'un gain est tombé. Cette ambiance électrisante peut rendre difficile la décision d'arrêter de jouer. Claudie, une habituée venue de la Mayenne, a développé sa propre stratégie pour maîtriser ses dépenses : "J'ai une cagnotte, je me fixe un budget pour ma visite. Quand il ne me reste plus d'argent, je m'arrête. Quand je gagne, c'est super. Mais lorsque je perds, je préfère aller prendre un verre et discuter avec des amis pour décompresser". Sa méthode lui permet de profiter du jeu tout en gardant le contrôle sur ses finances, une approche salutaire dans un monde où les sommes mises en jeu peuvent rapidement s'accumuler.

Nicole, quant à elle, a croisé de nombreuses personnes souffrant d'addiction dans les casinos. "Je les vois souvent, elles tremblent devant leur machine. J'ai même surpris des femmes qui laissent leur sac à main sur la machine pour aller vite chercher de l'argent aux distributeurs. En parcourant le casino, on peut observer des joueurs qui abandonnent des vêtements, comme un gilet ou une écharpe, parce qu'ils croient fermement que c'est leur machine porte-bonheur, sur laquelle ils vont être les prochains à gagner." Ces témoignages illustrent à quel point la magie du casino peut parfois se transformer en une véritable tragédie pour certains joueurs.

Etienne Léonard, spécialiste des addictions au sein du casino, partage son expérience. Il a récemment accompagné un jeune joueur pour instaurer une limitation volontaire d’accès, réduisant ses visites à une fois par mois. "Il m'a confié, 'Je vis chez mes parents et je mise tout mon salaire sur la roulette chaque mois. Pourriez-vous m’aider à mettre en place une restriction ?.' Pour nous, en tant que casinotier, c'est gratifiant d'aider quelqu'un à réfléchir sur ses comportements de jeu et d'établir un contrat qui pourra durer un an, avec des possibilités de reconduction. En 2024, nous avons déjà aidé environ une centaine de personnes à prendre conscience de leur addiction, et 18 d'entre elles ont réussi à limiter leur accès au casino", explique Etienne avec un mélange de fierté et de préoccupations.

Repérer les situations d'addiction

Pour le personnel du Casino de Bagnoles de l'Orne, la formation à l'accompagnement des personnes en difficulté face aux jeux d'argent est cruciale. Emmanuel Boisgontier, le directeur du casino, souligne l'importance de détecter les comportements d'addiction. "Il peut s'agir d'une irritabilité accrue, d'une fréquence de jeu excessive, ou d'une augmentation soudaine des mises. Nous avons des critères spécifiques qui permettent d'identifier les personnes à risque grâce à une observation attentive.", dit-il.

Dès qu'une personne est reconnue comme présentant des signes d'addiction, "le personnel peut alors dialoguer directement avec un membre de la direction et remplir une fiche d'alerte. Si le manager estime que la personne est réellement en danger, une rencontre d'accompagnement lui sera proposée, et suivant son acceptation, plusieurs solutions, comme une limitation volontaire d'accès, peuvent être mises en place. Nous proposons de restreindre ses visites au casino, limitées entre une et huit fois par mois", explique Emmanuel avec soin.

Si la limitation volontaire de jeux ne s'avère pas efficace, la personne souffrant d'addiction peut envisager de demander une auto-exclusion nationale, un dispositif qui lui interdit l'accès à l'ensemble des casinos en France ainsi qu'aux sites de paris en ligne. Cette démarche vise à protéger les individus en leur offrant une échappatoire face à la tentation continue des jeux.